GENS DU VOYAGE

Publié le par Regards

N°313. Mars 2005GEO CourrierDroit de réponseN°309, novembre 2004

Quelle ne fût pas notre indignation en découvrant l’article de votre numéro du mois de novembre 2004 intitulés « Manouches jusqu’au bout ». Vous avez enchaîné à l’occasion de ce reportage une série de stéréotypes surannés, de clichés néo-romantiques teintés de misérabilisme de proximité.

Affirmer que « les Tsiganes vivent entre eux, sans lien ni contact avec le monde des gadgé », relève d’une profonde méconnaissance et d’un mépris de nos communautés dont la plupart des membres sont français depuis 500 ans.Nous considérons par ailleurs comme diffamatoires les propos autour de la mise en scène des difficultés d’un jeune Tsigane de la famille photographiée, « un retard sans doute dû aux problèmes de consanguinité des Manouches ».

Regards est une association nationale de Tsiganes et Voyageurs faisant partie de l’historique Mouvement Confédéral Tsigane (MCT) créé en 1990 lors des journées culturelles tsiganes européennes de Strasbourg.

Notre dernière rencontre du 11 janvier 2005 à l’Elysée, a été une nouvelle fois l’occasion de parler des discriminations que subissent nos familles dans notre Pays.

La loi de sécurité intérieure du 18 mars 2003, dite loi « Sarkozy », nous rend passible d’emprisonnement pour le simple fait de s’être installé sur un terrain non destiné à cet effet.Les aires prévues pour notre accueil par les lois Besson du 31 mai 1990 puis du 5 juillet 2000 dans chaque commune de plus de 5000 habitants n’ont jamais été réalisées.

Pire encore, la loi du 13 août 2004 portant sur les Libertés locales prévoit une prolongation supplémentaire de deux ans alors que nous attendons depuis 15 ans maintenant.

Entre temps, la loi du 1er août 2003 sur la Ville et la rénovation urbaine souhaitée par M. Borloo, exonère une trentaine de villes de moins de 20 000 habitants dont la moitié de la population est en zone urbaine sensible (ZUS) de réaliser un terrain d’accueil pour les gens du voyage en raison de leurs déjà très pesants problèmes…

Interdiction territoriale, celle d’exister, d’habiter, pour nous, citoyens français, en vertu de l’irrespect le plus total des fondements républicains que constitue le préambule de la Constitution, la déclaration des Droits de l’Homme et son droit d’aller et venir librement.                                                            Notre présence dérange aux quatre coins de l’Hexagone, nous, vos 800 000 compatriotes.

Même nos « amis » nous rejettent sous prétexte qu’ils savent mieux que nous ce qui est bon pour notre avenir.Le 20 novembre 2004 s’est ainsi constitué le collectif des gens du voyage en colère face à la création sans notre participation de la Fédération Nationale des Actions Sociales auprès des Tsiganes (FNASAT) – Gens du Voyage.

Une dizaine d’associations tsiganes à travers la France dénoncent ce nouveau colonialisme en paraphrasant Nelson Mandela « faire pour les gens sans eux, c’est faire contre eux ».

 Nous demandions une simple invitation participative. Enfin, alors que l’on célèbre le 60ème anniversaire de la libération des camps d’extermination où certains d’entre nous ont perdu la vie avec les Juifs, nous rappelons que nous avons été internés dès avril 1941 par le gouvernement de Vichy dans les nombreux camps d’autorité française. Les derniers membres de nos familles qui ont eu « la chance » de ne pas être déportés en Allemagne, ont été relâchés en mars 1946 soit bien longtemps après la fin de la seconde guerre mondiale.Quel sera notre sort demain face à la montée des attitudes d’exclusion ?Qui nous donnera la raison de cet acharnement à nous éradiquer ?

DANY PETO-MANSO PRESIDENT DE REGARDS, MEMBRE DE L’ANCIENNE COMMISSION CONSULTATIVE NATIONALE DES GENS DU VOYAGE

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article